20 novembre 2006

Arlette, un dimanche


C’est poussé par une saine curiosité, une « recherche » sur les phénomènes religieux, que nous nous sommes retrouvés à une fête de Lutte Ouvrière un dimanche dans une petite ville de Bourgogne.
L’accueil était assuré par les Les Galoupios d'la galipette groupe de musique traditionalcoolomorvandelle dont les efforts pour chauffer la salle restait vains, et pour cause, le public n’était là que pour elle et pour la communion finale. Carrelé et éclairé aux néons à la manière de toutes les salles polyvalentes de France, dont on suppose que les architectes qui les conçoivent haïssent profondément l’idée même de fête, l’espace se remplit petit à petit d’une foule militante et patiente en pull jacquard. Quelques drapeaux rouges hissés sur des bambous attachés entre eux avec des ficelles constituent l’unique décor de la scène où trônent le micro et le pupitre. La déléguée régionale, les yeux brillants, nous annonce l’arrivée de « notre camarade Arlette Laguiller », applaudissements. « Travailleurs, travailleuses… ». Arlette lit son allocution. Fière comme un coq, la déléguée régionale lui tourne les pages. Arlette est une professionnelle, le discours est millimétré, les pauses nécessaires à l’absorption d’une eau minérale de marque inconnue car le bandeau a été ôté ont été savamment placées à la fin d’une envolée lyrique appelant incontestablement l’applaudissement. Tandis qu’Arlette boit telle une rock star de l’eurovision la délégué régionale, la larme à l’œil, ne perd pas une miette de son quart d’heure de gloire.
C’est lors de ce premier moment fusionnel que Jacques, Gudul et Virgil qui nous accompagnent, commencent à regretter de s’être placés au premier rang plutôt réservé aux aficionados… Allons-nous être repérés ? Les militants vont-ils nous taper ?
Arlette déroule avec talent un discours ponctué de références à l’actualité, d’un peu d’humour désabusé «bien sûr nous préférons Guignol à Gendarme.. » et de grands classiques Laguilletistes.
Voilà maintenant la fin du discours. La déléguée régionale, comme si elle venait d’y penser, nous propose d’entonner l’International. Tels des footballeurs perdus au milieu de la Marseillaise, nous optons pour un entre-deux insatisfaisant : nous nous levons mais sans chanter ni lever le poing droit… ce qui, même mollement, constitue la norme, le code. Notre malaise est à son comble. La délégué régionale nous regarde sans compassion. Puis la chanson arrive à sa fin, la messe est dite, ouf… Vite au bar !
Là, parlant entre nous de la cérémonie, Virgil se lance dans une analyse dont il a le secret « pas grand chose à dire sur le constat, oui on se fait bien entuber par les gros capitalistes depuis des décennies, mais ce qui est désespérant dans le discours d’Arlette, c’est qu’il y a comme une impuissance intrinsèque à voir au delà, à avoir un début de projet de société, à dépasser le travail et sa misère et voir en l’homme, quand bien même il serait mieux payé et enfin respecté, autre chose qu’un travailleur-producteur de biens et de services… pas un mot sur la culture, rien sur l’environnement… ». Des militants qui ont tout entendu lancent provocateurs « et bien vas lui dire, elle est là ! » Effectivement Arlette passait par là. Virgil qui aime bien faire le malin ne se démonte pas et aborde aussi sec Arlette « Euh…bonjour… c’est la première fois que je viens à un meeting politique et …euh…c’était intéressant mais euh… vous n’ayez pas dit un mot ni sur la culture ni sur l’environnement… alors que euh…». Arlette écoute gentiment et lui dit qu’elle n’avait pas le temps ici mais que tout cela est développé dans le journal du parti. Une militante qui ne voit pas d’un bon œil que l’on ose comme cela contredire la déesse et leur voler quelques minutes de sa présence TGV commence à grogner dans son coin et menace de mordre…
Bon, ben d’accord on ira voir dans le canard de LO. « Au revoir Arlette et bon courage pour la campagne ! »Dehors c’est dimanche. Tout semble lent et vain. La révolution chuchote.

PS : merci à Franck, Galoupio d'la galipette, pour la photo.

11 novembre 2006

Schiller, tu l'as lu dans quelle traduction ?

C’était « soir de première » dans notre bon Centre Dramatique National, fer de lance de la démocratisation culturelle. Les comédiens avaient reçu leur rose et des amis et d’autres comédiens leurs avaient envoyé des fax pour leur dire « un gros merde ». Après la représentation, des professeurs de français qui n’avaient pas dîné, quelques étudiantes, des conseillers artistiques, le personnel du théâtre et des comédiens se pâmaient autour du saucisson, un verre de blanc en main puis allaient à tour de rôle congratuler le metteur en scène et les comédiens. Il arrive dans ce type de rituel, lorsque l’alchimie de la convivialité ne prend pas, que les conversations, comme animées par un chef d’orchestre invisible et taquin se taisent les unes après les autres pour transformer le brouhaha en un silence plombant… Il convient alors aux personnes civilisées de relancer la conversation en posant à son voisin une question anodine et suffisamment ouverte pour lui permettre de rebondir facilement. C’est ce qui se produisit : notre voisin, un comédien, un conseiller artistique ou peut-être un directeur de théâtre lança à son voisin, un directeur de théâtre, un conseiller artistique ou peut-être un comédien « Schiller, tu l’as lu dans quelle traduction ? ». Nous ne pûmes retenir un rire qui à cause du vin public faillit être tonitruant. Notre civilité revenue nous mesurâmes l’ampleur de notre étonnement. Raoul s’essaya alors à un questionnement anthropo-métaphysique se demandant si le monde était divisé entre ceux qui pour relancer une conversation disait « beau temps pour la saison, tu fais quoi ce week-end ? » et les autres qui lançaient « « Schiller, tu l’as lu dans quelle traduction ? »… voulant nous impliquer dans sa démarche philosophique tout à fait louable dans un tel lieu de pensée et constatant que nous n’y arrivions pas il réamorça avec une approche sociologique et plus pragmatique «… souvenez-vous au lycée, les premiers de la classe, ce sont eux qui aujourd’hui pour relancer une conversation disent : Schiller, tu l’as lu dans quelle traduction ? » … Pas du tout convaincu par la démonstration de Raoul Jacques dit « Ben non, moi j’étais premier de la classe au lycée… ». Alors on se resservit un verre de vin public et on se demanda bien ce qu’on allait pouvoir faire ce week-end avec le temps pourri qui s’annonçait.

02 novembre 2006

Yann et Arthus sont dans un hélico.

Pour faire ses photos dignes du calendrier des postes et sensées nous sensibiliser à la protection de la nature, Yann-Arthus Bertrand passe son temps dans un hélicoptère. A part les avions de Dassault on fait pas pire question pollution. Bien sûr, des écolos malicieux lui ont fait remarquer. Le gaillard ne s’est pas démonté et a affirmé qu’il replantait systématiquement le nombre d’arbres nécessaire à l’absorption de ses gaz...
Al Gore doit faire pareil car pour promouvoir son thriller sur le réchauffement climatique il passe son temps dans les avions. Dans notre bonne vieil bourgade, comble de l’ironie, impossible de voir Une vérité qui dérange ailleurs qu’à l’extrême pointe Nord de la zone commerciale, au cinochrama tant apprécié pour son parking et ses pop corn géants. Ne voulant pas mourir grillés idiots on a pris la bagnole pour aller au maxicinoche puis au retour on est passé à Jardiland acheter un petit thuya qu’on plantera pour absorber les gaz de ce voyage déprimant.
Les pavillons sont entourés de thuyas pour absorber les conneries qui se racontent sur TF1.