26 juin 2006

Chronique éthylique (2) - Feu fête de la merguez


Siroptant une sangria entre collègues, nous bavassions comme il se doit sur les absents – l’acariâtreté du comptable, le machisme du petit chef, les hystéries de la secrétaire, etc – lorsque la sonnerie du téléphone de Raoul nous interrompit. C’était Jacques qui se demandait si nous avions l’intention de nous rendre à la fête de la musique. Bien sûr que nous en avions l’intention ! Comment envisager un seul instant de rater cette belle fête populaire, fleuron du socialisme des années 80 ? Ah ! La première fête de la musique à Clermont-Ferrand…
Nous voilà donc attablés à l’un de ces terrasses stratégiques qui permet de rayonner vers les places fortes de l’événement tout en pouvant se désaltérer entre chaque étape indispensable, citons entre-autre : les transes Gothiques rue Pouillou, le torrent de pisse rue Mayotte, la ferveur oecuménique de la chorale sur le proche de l’église Saint Médard et facultativement car l’exercice demande une humeur excellente le meilleur groupe de coiffeurs du canton « Nocturne » rue de l’UMP . Les décibels s’entrechoquaient, les farceurs gloups gloups se jetaient du Pont Branlant, les étudiantes de lettres couraient pieds nus, Gérard avait mis sa jupe indienne, tout semblait normal si ce n’était cette absence indéfinissable et cette rumeur qui enflait « Il paraît qu’à une heure pile tout s’arrête et ils vont tout nettoyer » … C’est plongé dans une grande conversation sur les vertus cathartiques de cette fête que nous nous fîmes, sans y prendre garde, déloger manu-militari par le serveur qui semblait bel et bien avoir reçu des plus hautes autorités des consignes très stricts… Laissant nos voisins à leur palabre désespéré et peu courtois « tu parles pas à ma femme comme ça ! », nous nous retrouvons, trio bancal et désemparé, à errer dans les rues de notre bonne vieille ville à la recherche d’un ultime groupe de Hardcor et surtout d’une toute dernière bière, histoire de ne pas se quitter comme ça… Mais rien… rien, pas même une petite échoppe clandestine, pas même ouvert chez Rush, interdit de vendre de l’alcool après 22h…Tout naturellement nos pas nous guidèrent alors vers le quartier Maroul là où, les belles années, les filles les plus enflammées dansent autour de la fontaine, quand elles ne s’y baignent pas, offrant aux âmes esseulées de belles images pour les songes d’hiver. Notre sang ne fit qu’un tour quand nous vîmes le bourgmestre en personne qui, perché sur la fontaine, tentait de convaincre une foule hagarde « allez, maintenant c’est finit, il faut rentrer chez vous, vous vous êtes bien amusé, maintenant il y a des gens qui veulent dormir, il y a des gens qui travaillent, soyez raisonnables on vous a prévu un très beau feu d’artifice pour le 14 juillet… » Un cauchemar… Plus loin, tentant vainement de comprendre ce qui se passait dans notre république laïque et démocratique, entre deux hypothèses, Raoul s’époumonât « Mais c’est ça qui manquait, y’avait même pas un seul marchand de merguez, putain, tout fout’l camp… » Heureusement, miracle, à quelques rues de là, un bistrot, comme hors du temps, continuait de servir en terrasse… « heu… 9 bières s’il vous plait »

19 juin 2006

Une belle phrase

"Il est inconcevable, parce qu'absolument contradictoire, qu'une société s'autoqualifie démocratique sans élever la capacité critique au rang des qualités publiques"

Jean-Marie Hordé, La Mort de l'âme, éditions les solitaires intempestifs.